Il est difficile de penser à ce que nous venons de vivre au moment où nous entamons une deuxième année calamiteuse, marquée de pertes de toutes sortes.
Le 12 mars 2021, le groupe de discussion communautaire s’est réuni pour la 21e fois en environ 12 mois, moment auquel nous diagnostiquions le premier cas de COVID-19 dans la région. Depuis, des centaines de milliers de Canadiens ont tout perdu. Bon nombre d’entre eux ont perdu leur emploi, et ne le retrouveront pas.
La pandémie ne nous affecte pas tous de la même façon, et nous le constatons sans cesse sur le marché du travail.
Les groupes les plus vulnérables – les Autochtones, les femmes, les travailleurs à faible revenu, les jeunes, les communautés racialisées, les personnes handicapées et les nouveaux arrivants – ont été disproportionnellement été affectés par les pertes d’emploi.
Depuis mars 2020, Centraide de l’Est de l’Ontario participe à un groupe de discussion communautaire en réaction à la COVID-19, composé de membres des autorités de santé publique, de municipalités, d’agences de services sociaux de première ligne, d’entreprises partenaires et d’autres représentants qui s’engagent à appuyer les personnes les plus vulnérables de nos communautés pendant la pandémie.
Cette semaine, des experts d’organismes d’emploi ont expliqué comment les occasions d’emploi équitable aident la reprise économique à la suite de cette pandémie. De plus en plus de vaccins sont administrés chaque jour; nous pouvons ainsi amorcer une reprise économique qui nous permettra de bâtir un avenir plus prospère pour tous en mettant à profit les leçons que nous avons tiré depuis le début de la pandémie.
Monica Cruz du Partenariat local pour l’immigration d’Ottawa (PLIO); Carole Lavigne du Développement économique et touristique des Comtés unis de Prescott et Russell; Jan Goatcher de la Société John Howard d’Ottawa; et Clara Friere, des Services sociaux et d’emploi de la Ville d’Ottawa; se sont jointes au groupe pour partager idées et stratégies menant à un avenir post-pandémie plus prospère. Voici ce qu’elles avaient à dire :

Par Michael Allen
Président et chef de la direction,
Centraide de l’Est de l’Ontario
En quoi consiste une reprise économique équitable?

« Les communautés aux statuts sociaux économiques les plus faibles avant le début de la pandémie ont été les plus affectées par les pertes d’emploi et la maladie; elles sont aussi plus susceptibles d’être au chômage de façon prolongée. »
— Clara Friere, Ville d'Ottawa
Sachant que la COVID-19 n’est pas la cause des défis sociaux auxquels nos communautés font face depuis les 12 derniers mois, Clara affirme qu’une reprise économique, c’est plus qu’atténuer les effets néfastes de la pandémie, c’est d’entretenir une stratégie à long terme qui tient compte des leçons apprises au cours de la dernière année.
Tous les invités ont insisté sur le fait qu’une reprise équitable doit puiser ses racines dans les diverses réalités de tous les membres de nos communautés. Les efforts de reprises doivent être collaboratifs, lutter contre le colonialisme, tenir compte des réalités culturelles et être facilités par les personnes qui ont été les plus touchés par notre nouvelle réalité.
Carole Lavigne a expliqué que nous devions continuer de collaborer et de communiquer avec les organismes communautaires pour qu’elles puissent participer à la reprise : tout le monde à un rôle à jouer.
« J’aimerais voir les gens, y compris les membres des populations vulnérables, participer aux activités communautaires et prospérer au sein de leur quartier. Nous devons offrir des services de sorte que les gens puissent réellement en tirer parti. »
— Jan Goatcher, Société John Howard d’Ottawa
Quel rôle les services communautaires peuvent-ils jouer dans le développement des politiques et la planification?
Le secteur des services sociaux offre des programmes qui sauvent des vies en appuyant la croissance économique, en diminuant les frais de santé publique, et en employant, en Ontario seulement, près d’un million de travailleurs. Monica a mentionné que les services communautaires sont essentiels lorsque vient le temps d’égaliser les chances, et qu’il faut offrir un accès égal, entre autres aux services d’éducation, de soins de santé et de logement.
Les services communautaires sont un excellent point de départ lorsque vient le temps de prévoir une reprise économique équitable. Ils doivent toutefois avoir une capacité organisationnelle adéquate, bénéficier d’un financement, d’obtenir des données à jour et à faire des recherches pour combler les besoins des personnes qui ont le plus besoin de notre aide.
Au fil des ans, le PLIO a créé des trousses permettant d’aider des organisations à être plus diversifiées et équitables. En encourageant les services communautaires et sans but lucratif à continuer de diriger les travaux en cours, nous aurons un effet économique encore plus important sur le secteur des services sociaux et ailleurs.

« Nous devons nous rappeler que l’équité est tant une ligne directrice qu’un objectif. »
— Monica Cruz, Partenariat local pour l'immigration d'Ottawa
Selon Clara, le secteur sans but lucratif est le mieux placé pour tenir les bailleurs de fonds, les partenaires et d’autres parties intéressées responsables de leurs objectifs en matière d’équité. Elle reconnait qu’il est important pour les municipalités de collaborer avec le secteur des services sociaux, notamment pour prendre des décisions structurelles et de planification antiracistes et anticolonialistes, mais aussi pour appliquer de telles pratiques.
Avez-vous des stratégies et des approches sur lesquelles vous travaillez actuellement et qui pourraient être renforcées?
Jan a parlé des quatre approches clés qui fonctionnent pour ses clients à la Société John Howard d’Ottawa, et explique qu’elles pourraient susciter un meilleur succès avec plus de ressources :
- Accès aux ressources : Téléphones cellulaires. Ordinateurs portatifs. Connexion Internet. Ces éléments essentiels contribuent à l’économie pendant la pandémie, et ils contribueront à l’économie mondiale post-pandémie. Les bailleurs de fonds ont été flexibles, permettant à la Société John Howard d’Ottawa d’utiliser des fonds pour faire des achats technologiques et d’offrir un accès Internet à prix abordable à ses clients, de sorte qu’ils puissent continuer de travailler ou de former leur effectif.
- Occasions de formation : Bien que la programmation à distance rende les services plus accessibles, ils empêchent aussi certaines personnes d’y participer. Jan souligne que les services de formation d’emploi doivent toujours communiquer de façon créative avec les personnes les plus vulnérables déconnectées afin que leur condition de vie ne se dégradent pas.
- Soutien en matière d’emploi : Pour plusieurs membres des populations vulnérables, trouver un emploi n’est qu’un morceau de casse-tête. Les services de soutien, comme des programmes de formation de base, des formations d’équivalence d’études secondaires pour adultes, des services de soutien en santé mentale, ainsi que des services de littératie financière et numérique, sont importants : ils permettent aux gens de trouver un emploi et de grandir dans leur rôle. Cela veut souvent dire d’aider les milieux de travail à s’adapter efficacement, et qu’il faut se pencher sur les emplois qui tiennent compte des traumatismes et de l’inclusion.
- Collaboration des services communautaires : « Un emploi, ça fait partie de la reprise ». Lorsque les services communautaires collaborent avec le secteur des soins de santé, les bailleurs de fonds, le gouvernement et le secteur privé, ils peuvent améliorer tous les aspects de la vie des membres des populations marginalisées.
- Accès aux ressources : Téléphones cellulaires. Ordinateurs portatifs. Connexion Internet. Ces éléments essentiels contribuent à l’économie pendant la pandémie, et ils contribueront à l’économie mondiale post-pandémie. Les bailleurs de fonds ont été flexibles, permettant à la Société John Howard d’Ottawa d’utiliser des fonds pour faire des achats technologiques et d’offrir un accès Internet à prix abordable à ses clients, de sorte qu’ils puissent continuer de travailler ou de former leur effectif.

« C’est le temps idéal de réajuster le salaire minimum, surtout lorsque nous estimons la valeur inestimable des commis d’épicerie et des travailleurs essentiels en cette période sans précédent. »
— Jan Goatcher, Société John Howard d’Ottawa
Le manque de transport public dans les communautés rurales est un obstacle en matière d’emploi pour plusieurs. Carole a expliqué qu’un projet pilote de transport public sur demande dans les comtés unis de Prescott et Russell a vu le jour en octobre 2019, mais que celui-ci a été mis en pause pendant la pandémie. Les comtés unis ont hâte de voir comment ils participeront à la reprise économise équitable au cours des prochains mois.
Quel est l’un des détails auxquels vous prêtez attention dans les plans et les annonces gouvernementaux?
Monica dit que le PLIO est toujours à l’affût des annonces donnant la priorité à la diversité et à l’inclusion. Par exemple, la Ville d’Ottawa a créé une unité sur l’équité des genres et des races, de l’inclusion, des relations avec les Autochtones et du développement social, ainsi qu’un groupe de discussion sur la reprise économique après la pandémie, deux stratégies bien accueillies à Ottawa.
Carole a fortement suggéré d’investir dans des logements abordables. Elle a aussi mentionné vouloir fixer le seuil de pauvreté de sorte qu’il tienne compte de la hausse du coût de la vie.
Jan cherche à financer de nouvelles entreprises sociales axées sur le soutien en matière d’emploi, car elles constituent d’importantes bases de formation pour les populations vulnérables. Bien qu’elles réussissent à aider les gens, elles ont souvent besoin d’aide et de temps pour devenir rentables.

Carole Lavigne
Développement économique et touristique,
Comtés unis de Prescott et Russell
Mener par l’exemple
Stéphane Giguère de Logement communautaire d’Ottawa (LCO) a expliqué que le catalyseur de l’approvisionnement social peut reposer sur l’élaboration de politiques internes qui priorisent la réalisation d’objectifs en matière d’équité. Selon lui, il ne faut pas compromettre la qualité ou le prix de l’approvisionnement social pour entraîner un effet social; il faut s’assurer que les entreprises sociales sont assez compétitives pour mettre en cause une valeur plus importante que les entreprises habituelles. C’est pourquoi LCO possède l’un des plus importants portefeuilles d’approvisionnement social au Canada.
Il a expliqué que Good Nature Groundskeeping en est un très bon exemple : l’entreprise sociale d’aménagement paysager de la région embauche des personnes souffrant de problèmes de santé mentale qui font face à des obstacles en matière d’emploi. Bon nombre de ses employés sont des résidents de LCO.

Stéphane Giguère
Président-directeur général, Logement communautaire d’Ottawa
« Nous savons qu’il s’agit d’un secteur dynamique. Nous savons que de plus en plus de gens des communautés à faible revenu ou marginalisées connaissent du succès. Nous savons que les communautés se portent mieux dans l’ensemble. »
— Stéphane Giguère, Logement communautaire d'Ottawa
Selon Jenn McCabe de la Ville d’Ottawa, le défi le plus important auquel nous faisons face, c’est de combler l’écart entre les entreprises sociales prêtes à effectuer le travail et les industries qui ne savent pas où trouver des occasions d’approvisionnement social. « Mon rêve, c’est de bâtir un réseau qui aidera les marchands locaux à atteindre des résultats sociaux » elle disait.
Stéphane et Jenn ont tous deux précisé les changements législatifs qui pourraient inciter les grandes organisations à prioriser l’approvisionnement social, ce qui rendrait le travail d’entreprises sociales talentueuses légitime.
Avenir
Au cours des 12 derniers mois, le groupe de discussion communautaire en réaction à la COVID-19 a mis ses ressources en commun, a partagé des données et a obtenu les commentaires de ceux qui ont vécu de telles expériences. Il a aussi parlé d’une seule voix pour relever les défis sociaux auxquels nos communautés doivent faire face. Ce groupe a préconisé, réimaginé et financé des programmes, des partenariats et des changements politiques pour combler les grands besoins auxquels les personnes les plus vulnérables doivent faire face.
Cette pandémie est loin d’être terminée, et elle entraînera des répercussions pour de nombreuses années à venir. Nous venons tout juste de déterminer comment nous bâtirons un avenir plus prospère pour tous. Voici nos principales recommandations permettant de mieux jeter les bases d’une reprise économique équitables :
- Mobiliser les communautés et les municipalités de sorte à investir dans des initiatives d’accumulation de la richesse communautaire et d’en tirer parti. De telles initiatives comprennent les entreprises sociales, les modèles d’approvisionnement social et les principes d’achats de produits locaux. Nous devons concentrer nos efforts sur les petites entreprises et mettre en relief les bassins de talents comprenant des groupes sous-représentés.
- Soutenir la communauté et tous les ordres de gouvernement afin de mieux combler les besoins de base (alimentation, équipement de protection individuelle, allègement des prix des services publics et actifs numériques) et d’améliorer l’accès aux programmes de littératie financière et fiscale. Nous devons combler les besoins de base avant de penser à réintégrer le marché du travail.
- Investir dans des programmes qui permettent aux personnes les plus touchées par la COVID-19 de recycler leurs compétences d’emploi, notamment pour les gens œuvrant dans les secteurs du tourisme, du service à la clientèle et de l’hôtellerie. Ces employés au chômage devront attendre plus longtemps que les autres pour réintégrer le marché du travail. Toutefois, ils peuvent anticiper un retour au travail plus rapide en améliorant leurs compétences, comme la littératie numérique.
- Aider les employeurs à bâtir des milieux de travail inclusifs et culturellement sûr, et leur offrir les outils et les ressources dont ils ont besoin pour le faire. Des réseaux, comme Embauche immigrants Ottawa (EIO), le bureau du Partenariat pour la réussite en emploi chez les jeunes (PREJ), Planet Youth Lanark County et le Partenariat en accès, informations et ressources d’emploi (PAIRE) seront le fer de lance de ce travail.
Bien que nous devions toujours gérer les répercussions de la pandémie, nous devons relever nos manches et espérer simuler une reprise plus équitable, juste, diversifiée et inclusive pour tous. Nous savons aussi que cela ne doit pas être un obstacle de la reprise économique : les deux peuvent se produire simultanément, et e meilleur intérêt de nos communautés. Nous avons appris des leçons l’année dernière, et avons les ressources pour aller de l’avant.
Au début du mois de mars, Centraide de l’Est de l’Ontario, en partenariat avec Santé publique Ottawa et des douzaines d’organismes du secteur communautaire, a lancé une initiative visant à aider les personnes les plus vulnérables pendant la pandémie de la COVID-19 qui afflige notre région. Ce partenariat nous a permis de résoudre des problèmes locaux, de prioriser les besoins et surtout, de collaborer. Pour en apprendre plus sur les façons d’appuyer l’initiative ou pour obtenir de l’aide de services communautaires, consultez notre site Web à centraideeo.ca/covid19